mardi 18 décembre 2007

Cul de sac


Certains c'étaient découvert un amour artificiel pour la "France d'en bas". Je reviens tout juste de ce que ce brave poitevin aurait pu appelé le "Brésil d'en bas".
Les favelas sont mystifiés dès que l'on sort du Brésil: repère des gangs, criminalité atteignant des sommets, trafic de drogues. Le film "La cité de Dieu" a romancé un peu tout ça pour montrer le coté bohème de la vie dans une barraque de planches. La réalité est autre: misère et violence sont bien sûr présent mais on voit aussi des gens qui veulent s'en sortir et une ville dans la ville avec une chaleur humaine dont Brasilia est totalement dénué.

Varjão est un cul de sac, une seule route permet l'entrée et la sortie des personnes et des véhicules. Le bus qui vient d'arriver dans la cuvette où se trouve la favela s'engouffre dans le quartier par la seule route bitumée. Au bord de la route, les brésiliens travaillent, un garagiste s'affaire sur une carcasse de voiture, un père de famille coule les fondations de son futur logis. Il pourra bientôt disposer les planches qui serviront de murs porteurs.
Contrairement au fantôme brasiliense où personne ne marche dans la rue, ici le quartier vit, les enfants se courent après et traverse la route en se frayant un chemin entre les voitures. Les terrasses accueillent les travailleurs faisant une pose, les femmes au foyers étendent leur linge sur un étendeur de fortune.
Implantée à flanc de colline, Il faut grimper une côte bien raide pour atteindre le sommet du quartier et profiter de la vue panoramique. Maison en dur, constructions sans fin, barraques faits d'objets de récupération: tout cela forme un gros tas où l'on ne distingue plus les allées entre les habitations. Au loin on voit le "Lago Norte", un des quartiers les plus riches de Brasilia où on trouve toute une série de condominios, cependant on ne mélange pas les genres. La favela est strictement délimitée par les routes qui l'entourent ainsi que la rivière qui se deverse au pied du quartier.
Alors que certaines maisons ont été construite en béton grâce à l'aide du Banque Internationale du Developpement (BID), la majorité des habitations ne sont faites que de bout de ficelles: des planches de récupérations, des briques glanées aux abords d'un chantier, une plaque de tolle qui sert de toit. Dans une rue sans asphalte, un vieil homme passe en donnant un bon coup de fouet sur son cheval qui tire une charette. L'animal n'a que la peau sur les os, les côtes et le bassins ne sont plus dissimulés par la graisse (on ne nourrit le canasson que si la famille parvient à se nourrir elle même, ce n'est pas toujours le cas). Dans sa remorque, on distingue plusieurs barre de fer qui serviront surement pour renforcer l'aussature de sa maison.

Assis à la terrasse d'un bar, je prend un jus de canne à sucre avec un "pastel de queijo" (friture fourré de fromage" en compagnie de deux amis brésiliens. "Ça me rapelle mon enfance" sourrit Géronimo qui a grandi dans la campagne du Mato Grosso "Là bas, dès que tu sors des villes tu retrouve la même situation". Chacun essaye de comprendre comment une société peut laisser s'implanter de tels guettos. La douceur qui est dans nos verres ne parvient pas à effacer notre amertume face aux différentes poliques libérales dans le monde. Les extravagances conjugales de N.S font bien rire Géronimo et Paranà.
On se dirige vers la place centrale qui accueille l'école. A coté, le siège de la police militaire. Le sergent Paulo Renando est assis à l'extérieur, le regard fixé au loin derriere d'opaques lunettes de soleil. "La situation s'est drolement améloiré depuis 5 ans, aujourd'hui c'est beaucoup plus tranquille". Difficile de lui faire avouer la raison, il ressace toujours le même message et ne se prononce ni sur la réalité du terrain, ni sur les problèmes rencontrés, encore moins sur le quantitatif. Il botte en touche à chaque fois "la police civile à des statistiques empiriques et précises, je peux pas vopus dire comment ça évolue exactement." "Moi, je reste ici au poste, demandez à mes collègues qui viennent de rentrer de patrouille." "L'administration générale de Varjão pourrait vous aider sur ce point parce que je ne suis pas abilité à parler de ça." En fin d'entretien, il lâche: "Certaines personnes quittent Varjão pour s'installer ailleurs, dans les autres favelas de Brasilia." En langage officieux, ça signifie que certains habitants ont été priés, avec les honneurs militaires, d'aller mettre la pagaille ailleurs. On ne résoud pas le problème, on le déplace. Quand on le questionne sur la présence de la police dans la favela, son visage se crispe: "Quand la police est là, les gens ne veulent pas nous voir pour pouvoir régler leur problèmes tout seul, quand nous sommes absents, ils réclament notre présence." Un policier, quelque soit sa nationalité réagit toujours de la même manière et il se réfugie très souvent derrière l'uniforme, le grade, la hierarchie.
Lorsque l'on déambule dans les rues et que l'on observe les échoppe, on remarque très facilement la proliférations de deux types de commerces: les bars et les églises évangéliques. Les buvettes sont à tous les coins de rues: en retrait à l'intérieur d'une cour, dans la rue commerçante mais aussi à un croisement, la terrasse délimités par quatres planches de bois. Les églises sont toutes en bétons mais on ne les remarque pas tout le temps. Cela dépend de la taille de l'enseigne. Pour un quartier somme de petite taille, j'ai dénombré plus d'une dizaine de lieux de culte (et je n'ai pas parcouru tout le quartier). La réalité saute aux yeux, le coktail est parfait. Alcool et religion, l'idéal pour pouvoir oublier la misère du quotidien. C'est aussi l'assurance pour les dirigeants que la populasse restera cloitrée où elle est et qu'elle n'essayera pas de s'émanciper.
Dans le bus qui nous ramène à Brasilia, on dresse un premier constat: Varjão est un cul de sac. Après avoir constaté les conditions de vie des habitants et le peu d'investissement du gouvernement pour les améloirer, on en conclue que le cul de sac n'est pas seulement géographique mais il est aussi social.

crédits photos: Par sécurité, je ne m'étais pas muni de mon apareil photo. Les photos sont donc issues du site du gouvernement du DF et de la banque mondiale.
Modification: 19/12, ajout du paragraphe sur les bars et les églises

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