lundi 19 novembre 2007

Les berceuses assassines


Déambulations nocturnes au cœur de la capitale brésilienne. Quand la semaine prend fin et que la nuit tombe, chacun regagne ses pénates. Beaucoup de fonctionnaires ne sont là que pour le travail et les plus fortunés retrouvent leur état d’origine le vendredi soir. Brasilia se vide de ses habitants et un fantôme urbanistique prend vie pendant les quelques heures d’obscurité.

Une faune bien particulière se met en action laissant apparaître le coté obscur de la société. Deux agents de nettoyage vêtus d’une tunique orange fluo balayent le bas coté de la rue. Balais en main, ils avancent lentement et déblayent les feuilles mortes et les détritus que les brasilenses n’ont pas daignés jeter à la poubelle. Alors que la ville s’endort, bercée par Globo, ils travaillent jusqu’au petit matin. Extraterrestres que la société de consommation oblige à vivre à contre temps.

Des amas de détritus sont cependant laissés sur place. Sous une bâche plastique, des objets en fin de vie s’entassent. Ce n’est pas une déchetterie à ciel ouverte, c’est la tente d’un sans abris qui espère un jour échanger ce qu’il a amasser contre quelques reais.

A coté de la gare routière, en bas des hôtels de luxe, se trouve le Conic. Lorsque l’ordre moral évangélique s’accorde un peu de repos, les marginaux de la société se retrouve dans ce quartier, représentant d’un monde schizophrène. Les prostituées sont présentes en nombre. Talons hauts, très hauts ; shorty court, très court ; visage fardé et fragrance bon marché, elles arpentent les trottoirs à la recherche d’un client en manque d’amour. Près d’un arbre, elles discutent pour passé le temps. Un taxi passe, une nouvelle collègue en descend et la seconde d’après tout ce petit monde s’éparpille pour rejoindre le territoire restreint dans lequel elles déambulent en attendant de satisfaire les bas instincts d’un pervers fortuné. Elles alpaguent parfois le potentiel client. La voix, seul élément qui permet de distinguer le travesti de la femme. La chirurgie plastique et les traitements hormonaux font des merveilles.

Au loin, on distingue une silhouette humaine assise par terre. Les rats, amateurs d’ordures, s’approchent d’elle. L’individu n’a même plus la force de les faire fuir. Camé à la merlã (dérivé bon marché et destructeur du crack), il ne réagit plus aux éléments qui l’entourent. Il voyage dans des univers connus par lui seul.

Ce rassemblement de « marginaux » est sous la bonne garde de la police militaire. Les véhicules tournent dans le quartier et veillent à ce que tout se passe comme elle l’entend. Ce soir, il n’y aura pas de rafle. Une partie des effectifs est restée au poste : un petit bâtiment au milieu de la place à quelque pas de la première fille de joie. La police aussi a besoin d’amour, elle se contente en regardant un film porno à la télévision.

Face à toute cette débauche, Dieu a du souci à se faire. C’est sans doute pour canaliser cette vague de péché qu’il a installé une église baptiste sur cette même place. Les fenêtres ouvertes permettent d’entendre le sermon d’un pasteur en très grande forme. Il réclame le salut pour toutes les âmes perdues ainsi qu'un traitement rapide pour les malades de l'artrite.

Ainsi va le Brésil, pays de contraste. Il se proclame « un pays de tous » ( "Brasil, Um Pais de todos") et laisse un grande partie de la société en marge. La morale religieuse impose sa loi jusque dans l’hémicycle du Sénat mais accepte que certains vivent selon « les règles du diable »



Photo: Cette photo n'a pas été pris au Brésil, c'est une illustration prise en France, il y a deux ans

Aucun commentaire: